Galerie
Le Toit du Monde
La galerie Le Toit du Monde a été créée par François Pannier en 1984 sur la Butte Montmartre avant de s’installer rue Visconti. Rejoint par Adrien Viel, ils travaillent ensemble à l’étude des cultures himalayennes et à la recherche de pièces exceptionnelles représentatives de la richesse et de la variété de l’art de cette région.
Pourriez-vous nous décrire votre parcours ? Pourquoi cette spécialisation dans les arts asiatiques ?
François Pannier : Mon parcours a commencé il y a soixante-dix ans. J’avais dix ans, en vacances chez ma grand-mère en Touraine, et je m’occupais avec les livres de la bibliothèque que mon oncle avait constituée entre les deux guerres. Elle contenait des tas de romans d’aventures, comme les livres d’Arnould Galopin, auteur oublié par tout le monde aujourd’hui, et qui n’avaient rien d’ethnographique. Pendant une exposition sur les petits explorateurs au musée du Quai Branly [Le Magasin des petits explorateurs, 2018], l’ancien directeur du musée, Stéphane Martin, a parlé de cet auteur. Il s’interrogeait sur le rôle de ces romans d’aventure et la façon dont ces textes “inintéressants” avaient nourri des vocations. Et c’est également ce qui m’est arrivé.
C’est donc très tôt que je me suis intéressé à l’Asie. A la même époque, j’ai rencontré un camarade de classe, devenu un ami, dont le grand-père était diplomate à Pékin lors de la révolte des Boxers. Sa famille avait des collections d’art chinois. J’ai donc commencé par m'intéresser à l’art chinois comme les parures en plumes de martin-pêcheur et les céramiques Ming - œuvres auxquelles je ne m’intéresse plus aujourd’hui.
J’ai commencé à collectionner dès mes quinze ans. Mes parents habitaient à côté de la place du Trocadéro, entre le musée de l’Homme et le musée Guimet, deux musées que je fréquente toujours.
J’ai été très marqué par un premier voyage en Inde en 1973, avant de découvrir l’Himalaya en 1976 à travers le Ladakh et le Népal. Ça a été le coup de foudre. J’étais chef comptable et chef de personnel à l’époque, mais la comptabilité m’ennuyait beaucoup… donc, en 1980, j’ai envisagé de changer de vie. Le 1er avril 1984, il y a quarante ans, j’ai ouvert ma galerie sur la Butte Montmartre avant d’arriver rue Visconti en janvier 2000.
C’était au début assez marginal, personne ne connaissait rien à l’art de l'Himalaya, le Népal s’étant ouvert assez récemment, j’ai donc fait un travail de découvreur et d’explorateur de cet art-là. Maintenant, il y a beaucoup plus de personnes qui s'intéressent à ce domaine : il va y avoir entre autres une exposition pour l’évènement Paris Tribal, au Crous rue des Beaux-Arts, avec Alain Bovis et Frédéric Rond qui préparent une très belle présentation sur les masques de l’Himalaya. J’ai également fait beaucoup d’expositions avec des catalogues, donc je peux dire que j’ai laissé quelques traces sur le sujet.
Adrien Viel : J’ai un parcours tout à fait singulier. J’ai une formation de réalisateur documentariste et j'ai réalisé plusieurs long-métrages documentaires au Népal. Petit à petit, ce travail de réalisateur avec une conscience sur le montage, la dramaturgie, sur les histoires des personnages que je dois filmer, m’a amené à m'intéresser un peu plus aux pratiques de ces populations à travers un axe ethnographique, notamment leurs pratiques sacrées à travers des festivals annuels liés à l’agriculture, leurs pratiques chamaniques et la construction du tambour.
Parallèlement à une recherche doctorale à l'Université de Lille, je me suis aussi engagé dans l’Association pour le Rayonnement des Cultures Himalayennes (ARCH) fondée par François. Je me suis donc engagé dans la galerie Le Toit du Monde. C’était très cohérent puisque l’on vend ici des objets que je voyais dans les villages comme des tambours de chamanes Chepang ou Tamang. J’ai beaucoup étudié la construction de ces tambours et tous les mythes à travers la construction de ces objets. Il y avait donc un lien entre ce que je voyais dans les villages au Népal, ma recherche ethnographique, et les objets que l’on vendait ici.
Nous avons fait avec François une anthropologie inversée : on partait des objets que l’on voyait ici dans les collections privées, les galeries et les musées, et on remontait aux populations pour savoir comment ces objets étaient utilisés et quelle était leur fonction. Ces objets nous interrogeaient : les phurbu oiseaux psychopompes des Gurungs, les phurbu dagues rituelles, les cavaliers phurbu ou encore les bracelets d’archers étaient des objets qui avaient été très peu étudiés et que nous avons essayé d’analyser pour en savoir plus à leur sujet.
Comment pourriez-vous décrire votre galerie ?
François Pannier : Dans un premier temps, comme on connaissait peu de choses sur l’art tribal, je m’étais d’abord intéressé à l’art classique. C’est au fur et à mesure que j’ai découvert les objets tribaux, et en particulier les objets chamaniques où je me suis davantage spécialisé comme ces dagues d’exorcisme, les phurbu. Je fais d’ailleurs une donation à la fondation de Philippe Charlier, ancien directeur du département de la Recherche et l’Enseignement du musée du quai Branly - Jacques Chirac. Dans le cadre de la Fondation de l’Institut de France, il a créé la FAAB, la Fondation Anthropologie, Archéologie, Biologie-Institut de France.
Finalement, la galerie est un peu éclectique puisque je propose à la fois de l’art classique et de l’art primitif, mais je me suis plus orienté maintenant sur le primitif, et c’est comme ça que j’ai rencontré Adrien (Viel), qui était venu me voir au moment où il a sorti son film sur les chamanes de l’Himalaya. Les objets que les gens recherchent le plus dans l’art himalayen sont les masques. Ce sont des objets qui sont connus de tous, et l’on se retrouve notamment avec des collectionneurs d’art africain qui sont désormais dépassés par les prix de pièces majeures en art africain, alors que les prix des pièces majeures en art himalayen restent plus abordables.
Statuette de Lokesvara en bois de Zitan
Tibet, XI-XIIe siècles
66 cm
Ce buste provient du monastère de Shigatsé au Tibet, mais sculpté par des artistes newars.
Provenance : Ancienne collection Ian Triay
Adrien Viel : Le travail de galeriste a beaucoup changé en quarante ans. A l’époque, les amateurs rentraient dans la galerie, sans prendre de rendez-vous, et repartaient avec différentes pièces. Aujourd’hui, les choses ont beaucoup évolué : c’est plus compliqué pour les gens de rentrer dans les galeries donc on voit moins de personnes et celles-ci achètent moins de manière impulsive. Le travail a aussi beaucoup changé notamment avec internet, nous devons contacter des institutions, des musées, les collectionneurs en ligne. Donc c’est plutôt à nous d’aller chercher toutes ces structures, les maisons de ventes et les personnes qui collectionnent. C’est tout un univers qui s’est transformé et lorsque François me raconte son travail d’il y a quarante ans, je me rends compte que c’est devenu un métier très différent. Nous avons désormais aussi beaucoup de contraintes, notamment pour le Népal pour lequel les autorisations de sorties étaient très vagues avant mais aujourd'hui nous ne pouvons plus justifier que certaines pièces correspondent à ces autorisations. Les choses se compliquent aussi avec les organisations internationales comme les nouvelles réglementations au niveau de Bruxelles, c’est un problème au niveau européen.
Chapeau d’oracle de Nechung en papier-mâché, bois et fourrure
Tibet ou Mongolie
XVIIIe-XIXe siècle
48.5 cm
Provenance : Paul Morse, Himalayan Antiques, Ipswich, USA
Pouvez-vous nous parler des “Lettres du Toit du Monde” que vous avez créées ?
François Pannier : J’ai réalisé “Les lettres du Toit du Monde” dès l’origine de la galerie, lorsqu’on avait un certain manque d’informations sur les objets. Ce sont des articles sur des objets ou des traditions. La première lettre du Toit du Monde que j’ai réalisé portait sur les Ghurra, éléments pour baratter le beurre. Paul De Smedt, collectionneur belge, collectionnait ces objets qu’il trouvait beaux et avec une patine de qualité. Il les achetait sur le marché de Bruxelles sans savoir de quoi il s’agissait et les marchands n’en savaient pas plus. Il en a parlé au directeur du musée Rietberg à Zurich qui lui a alors montré ma lettre. De Smedt raconte, dans le livre qu’il a écrit, que ma lettre fut le déclencheur de sa connaissance sur ce type d’objets. C’est intéressant de voir que l’on peut produire des articles qui débouchent sur quelque chose. Nous nous approchons aujourd’hui de la quarantaine de lettres du Toit du Monde et nous continuons à en faire. Nous projetons de publier un livre pour les regrouper.
La galerie a fondé l’Association pour le Rayonnement des Cultures Himalayennes (ARCH), pouvez-vous nous en dire plus ?
François Pannier : En 1989, j’avais réalisé la première exposition majeure sur les masques de l’Himalaya à l’Etablissement public de l’aménagement de la Défense (EPAD). L’EPAD était en train de construire des bureaux à la Grande Arche de la Défense, donc beaucoup de personnes travaillaient là-bas, mais il n’y avait rien de culturel en contrepartie. Deux lieux d’exposition avaient donc été créés dont un espace qu’on m’avait concédé pour y tenir une exposition sur les masques himalayens. L’exposition ayant eu beaucoup de succès, on m’a demandé d’exposer à nouveau en 1990. A cette occasion, j’ai voulu emprunter des pièces à des musées, notamment du musée de l’Homme, mais cela m’était impossible en tant que galeriste. Alain Erlande-Brandenburg, adjoint du directeur des musées de France à l’époque, m’avait alors conseillé de créer une association pour pouvoir emprunter des objets à des musées et j’ai donc fondé l’ARCH en 1990. Depuis, nous organisons régulièrement des expositions et des conférences dans la galerie. En ce moment, nous sommes en train d’organiser un cycle de conférences en collaboration avec la Fondation culturelle du musée Barbier-Mueller.
Un objet phare ?
François Pannier : J’ai acheté un masque dans les années 1990 à un collectionneur de La Haye. Je lui demande après coup s’il connaissait l’histoire de ce masque. Il me raconte qu’il l’a lui-même acheté à un pasteur suédois qui avait fait une mission en Asie centrale avec Sven Hedin. C’était ce dernier qui aurait acheté ce masque en sa présence dans les années 1910. Il m’explique que Sven Hedin l’aurait acheté comme étant en peau humaine ; il y avait effectivement une tradition de fabrication de masques en peau humaine au monastère de Sera au Tibet. J’ai beaucoup d’objets qui étaient en ossements humains, mais Sven Hedin était quand même nazi et a soutenu Hitler, donc dans mon esprit j’ai un peu assimilé ce masque aux abat-jours en peau humaine que les nazis faisaient. J’ai donc mis ce masque dans un placard en le négligeant un peu. Vers 2001, Nathalie Bazin du musée Guimet, qui organisait alors l’exposition Rituels tibétains : visions secrètes du Ve Dalaï-lama, recherchait des objets tantriques. Elle est donc venue voir ce masque qui correspondait à ce type d’objets très tantriques. La question restait : était-il en peau humaine ? J’ai mis à peu près deux ans avant de découvrir ce que c’était. J’ai d’abord contacté l’institut médico-légal à Paris qui ne pouvait pas analyser des objets pour des particuliers.
Masque collecté par Sven Hedin
Papier mâché
H. 25 cm
Ancienne collection Ian Miog - La Haye Collection François Pannier
J’ai alors été mis en relation avec le directeur de l’Institut de Paléontologie Humaine de Paris qui a effectué un prélèvement en cherchant une ADN mais qui n’aboutit à rien. Un jour, en lisant un article, j’apprends que le laboratoire de la gendarmerie nationale avait fait des études sur des momies égyptiennes. Je les contacte, mais eux non plus ne réalisent pas d’analyses pour des particuliers. Ils me conseillent néanmoins de contacter le service d’un hôpital. Finalement, je tombe sur un médecin passionné par ce genre de choses, Philippe Charlier, qui réalise un prélèvement. Il s’est avéré que le masque était en fait du papier mâché. C’est un objet qui m’a obsédé pendant pas mal d’années, le temps de réussir à savoir de quoi il s’agissait.
J’ai une cliente qui s’était rendue au monastère de Sera et qui avait photographié un masque en peau humaine mais ce dernier n’était pas ressorti sur la photo. C’est un phénomène que l’on constate aussi dans certains cas, le chamane prévient qu’il n’apparaîtra pas sur la photo. L’anthropologue Jérémy Narby raconte aussi que quelqu’un voulait enregistrer le chant d’un chamane, mais celui-ci lui a affirmé qu’il n’entendrait rien, et la bande son n’a effectivement pas fonctionné. Nous avons des tas de situations bizarres que l’on n’arrive pas à expliquer.
C’est aussi ce qui m’a passionné dans mes recherches sur les objets : on rencontre énormément d’inconnus et cela permet d’ouvrir d’autres horizons. Par exemple, les phurbu, ces dagues d’exorcisme de chamanes, assorties aux poignées des tambours dyangro qui servent à aspirer les forces démoniaques par la pointe afin de les neutraliser. Les personnes qui sont médiums ont beaucoup de mal à passer dans l’axe de la pointe de la dague. J’en ai confié à Philippe Charlier qui les a passés au Commissariat à l’Énergie Atomique et aux Énergies Alternatives : ils disent qu’il se passe effectivement des choses, mais ils ne savent pas les expliquer pour le moment. Ce qui est sûr, c’est que ce n’est pas un objet neutre. Cela fait partie des objets qui me passionnent.
L’année dernière, le Musée des explorations du monde à Cannes a présenté l’exposition Chamanes, sur le chamanisme au niveau mondial. J’en ai été le commissaire scientifique et Adrien le conseiller scientifique pour l’Himalaya. Nous avons aussi organisé, en décembre 2022, une journée d’études au musée du Quai Branly qui a eu un fort retentissement sur les racines des chamanismes, et l’on se retrouve avec une quantité de situations bizarres que l’on ne peut pas expliquer scientifiquement mais que l’on peut réellement constater.
Dague Phurbu et poignée de tambour
Bois
c. XVIIe ou XVIIIe siècle
Hauteur : 43 cm pour la poignée et 34 cm pour la dague.
Provenance :
Ex collection Michel Lostalem, Paris.
Ex collection Bruno Gay, Paris.
Photographie : Bertrand Hugues
© Galerie Le Toit du Monde, Paris.
Quel serait selon vous, l’ouvrage de référence dans votre domaine ?
François Pannier : Le livre de Jérémy Narby, Anthologie du chamanisme, est une œuvre très intéressante qui traite du chamanisme depuis l’origine de sa découverte à travers les textes d’anthropologues et d’ethnologues. Il n’y a pas de texte fondateur pour le chamanisme. Dans chaque région, Adrien et moi nous trouvons confrontés en permanence à ce genre de problèmes : les gens disent qu’ils ont vu des chamanes, qui sont en réalité des hommes-médecine - par exemple - mais pas des chamanes. Tout cela est très mélangé, nous faisons notamment des conférences le soir sur ces sujets-là.
Il y a t-il une œuvre qui vous a particulièrement marquée dans votre vie ?
François Pannier : Il y a une fresque à Florence que j’adore : la Crucifixion de Perugino. A chaque fois que j’allais à Florence, j’allais voir cette peinture située dans la salle capitulaire du couvent Santa Maria Maddalena dei Pazzi. C’est une œuvre à des années lumières de l’art de l’Himalaya mais cette peinture me fascine. Autant la Joconde me laisse complètement froid, autant je trouve cette fresque incroyable.
Avez-vous un musée favori ?
François Pannier : Le Louvre, j’ai dû y aller 500 fois. Maintenant que j’ai la carte des Amis du Louvre, je prends le bus le soir rue Bonaparte et je vais voir trois salles… et ça, c’est merveilleux. On n’a pas le temps d’être fatigué, et on voit quelques objets dont on se souvient bien. De la même manière pour Florence où il y a toujours énormément de monde, par exemple au musée des Offices, je visite plutôt les écoles qui sont généralement des anciens couvents et monastères qui possèdent des fresques. J’adore pouvoir visiter des endroits improbables et peu fréquentés, je trouve ça absolument magique ! Au Louvre, j’aime bien la peinture du XVIIe siècle français avec notamment les peintures de Sébastien Bourdon et les peintres de son époque. J’ai également beaucoup aimé la sculpture de la Renaissance pendant un temps, mais ça m’est un peu passé. Il y a aussi des salles au Louvre qui ont beaucoup changé. Dans le temps, il y a cinquante ans, on pouvait admirer Les Noces de Cana de Véronèse, la Joconde se trouvait dans la Grande Galerie et il était très facile de la contempler, ce qui est devenu impossible aujourd'hui.
Il y a t-il une conférence qui vous a marquée ?
François Pannier : Nous avions présenté un film de Véra Frossard sur les guérisseurs du Népal et il y avait entre-autres une guérisseuse d’origine tibétaine dans le film. On apprend qu’elle a soigné une Française qui avait des calculs rénaux, elle lui suce le dos au niveau des reins et crache les calculs et des caillots de sang dans une cuvette. La Française en question, qui était au rez-de-chaussée lors de la présentation de ce film, c’était Bernadette Vasseux, la secrétaire de l’ambassade de France à Katmandou à l’époque, qui nous a confirmé les faits et nous assure que, depuis, elle n’a plus de calculs dans les reins. Elle raconte qu’elle a récupéré les calculs qu’elle a donnés à son médecin et celui-ci les a mystérieusement perdus. Sur le coup j’ai pensé que ce dernier avait simplement préféré ne pas être mêlé à cette histoire. Un jour, j’en parle à Hervé Nègre, photographe qui a travaillé avec l’ethnologue Jean-Yves Loude sur les Kalash du Pakistan, et il me dit qu’il a assisté à des soins faits par des chamanes chez les Kalash. Ces derniers suçaient les tumeurs, les crachaient avec des caillots de sang, et deux jours après, tout s’était complètement évaporé. On peut estimer que la matière se transforme lorsqu’elle passe par les tissus des organes et de la peau. Le monde scientifique reste très perplexe lorsque l’on cite cette situation.
Nous faisons donc beaucoup de conférences sur ce type de sujets un peu surnaturels, avec des chercheurs et des ethnologues. A la fin du mois, nous ferons une conférence dans les locaux de la Société de Géographie, gérée par l’EPAD, sur les pratiques chamaniques des Inuits.
Vos projets futurs ?
François Pannier : J’ai 80 ans donc je suis en fin de carrière et c’est Adrien qui reprend la galerie. Je suis très heureux que la galerie continue avec lui. Après notre rencontre, je l’avais introduit auprès de Jean-Paul Barbier-Mueller. Adrien a obtenu la bourse de la Fondation pour ses travaux.
Adrien Viel : En ce qui concerne la galerie, nous allons continuer à participer aux évènements culturels du quartier, que ce soit Paris Tribal, le Printemps Asiatique, le Parcours des Mondes, en plus des expositions liées à la galerie. Nous avons notamment prévu quelque chose sur les Nagas. Nous relançons également notre partenariat avec différents artistes contemporains. Pour le Paris Tribal nous avons les Staëlens, qui sont des artistes contemporains qui réalisent de très belles sculptures en différents types de matériaux. En septembre, nous aurons l’artiste Mike Esson qui réalise des dessins assez torturés de squelettes. Nous souhaitons ainsi proposer d’autres formes d’œuvres et faire ce dialogue entre l’art contemporain et les objets d’arts premiers liés à la galerie.
Nous avons également été experts auprès des commissaires-priseurs pour des ventes aux enchères. Ce n’est pas vraiment notre priorité, mais cela reste intéressant pour s’ouvrir à d’autres personnes.
Adrien, vous venez de publier une thèse, pouvez-vous nous en dire plus ?
Adrien Viel : En effet, grâce à la Fondation culturelle du musée Barbier-Mueller, j’ai pu développer ma recherche de thèse plus facilement et la publier. Le livre est sorti en fin d’année dernière et c’est une étude socio-culturelle sur une population du Népal qui s’appelle les Chepang. A travers cette étude, je revois un peu leur parcours de chasseurs-cueilleurs d’ancienne société de nomades, et puis leurs pratiques chamaniques, que ce soit dans le contexte nomadique ou dans le contexte sédentaire. J’essaie de voir les écarts entre ces deux pratiques de chamanisme, celui de chasse et celui qui est sédentaire, ainsi que leurs transformations notamment avec les conversions au monothéisme. C’est une étude qui comprend beaucoup de photographies, argentiques et numériques, car mon étude de thèse s’est aussi faite avec une spécificité en anthropologie visuelle. L’annexe me tient particulièrement à cœur puisque c’est l’étude photographique de la construction du tambour qui est restée très rare dans les recherches ethnographiques. J’étais content d’y être arrivé et surtout content de voir que la jeune génération avait été impliquée dans cette construction, alors qu’elle ne l’avait jamais vue. Les plus anciens en avaient un souvenir assez lointain. Ce projet a permis de mettre à jour ces pratiques traditionnelles qui sont évanescentes dans le contexte actuel, global et contemporain.
En savoir plus :
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François Pannier, Stéphane Mangin, Masques de l’Himalaya. Du primitif au Classique, Paris, Editions Raymond Chabaud, 1989
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Galerie Le Toit du Monde, Art chamanique népalais, catalogue, 2007
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Jeremy Narby, Francis Huxley, Anthologie du chamanisme. Cinq cents ans sur la piste du savoir, Paris, Albin Michel, 2009
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Adrien Viel, Les Chepang du Népal, Paris, In Fine Editions d’art, 2023
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